Chers ami(e)s,
J’ai le grand plaisir de vous annoncer la parution de mon nouveau livre. Il ne s’agit plus de poésie, mais de recherches sur l’histoire et les cultures de la province viêtnamienne de Khánh-Hòa (capitale : Nha Trang), qui est en « coopération décentralisée » avec le département du Morbihan où je vis :
Đông Phong Nguyễn Tấn Hưng
Monts et merveilles au Pays du Bois d’Aigle
Cultures migratoires de la province viêtnamienne de Khánh-Hòa
290 pages et 16 illustrations hors textes
EAN : 9782748347630
Éditions Publibook, Paris
http://www.publibook.com/boutique2006/detail-4472-PB.html
J’ai aussi l’honneur de vous présenter ci-après la préface par Monsieur Philippe Papin.
Je vous remercie de lui prêter votre aimable attention.
Đông Phong Nguyễn Tấn Hưng
PS: le bénéfice des ventes de ce livre sera versé aux enfants viêtnamiens nés handicapés à cause de la dioxine déversée par les Américains il y a presque 40 ans. Ce défoliant continue
de faire des dégâts là-bas.
Préface
Par Philippe Papin
Directeur d’Études
École Pratique des Hautes Études - La Sorbonne
Ancien Directeur de l’École Française d’Extrême Orient de Hanoi
Ces Monts et Merveilles au pays du bois d’aigle constituent un ouvrage curieux et foisonnant, plein de surprises et de révélations, où le lecteur est emmené, page après page, à travers le paysage, l’histoire et les légendes de la province de Khánh-Hòa. L’auteur, Nguyễn Tấn Hưng, connaît parfaitement ces lieux qu’il a cent fois arpentés, pour le travail ou le plaisir, toujours muni d’un petit calepin, l’œil à l’affût et l’oreille aux aguets. Le Khánh-Hòa est sa terre d’élection, et il faut l’avoir entendu en parler pour mesurer à quel point ce constat n’est pas une clause de style.
Après avoir présenté les caractéristiques essentielles de cette province, et notamment sa géographie physique et humaine, l’auteur fournit un résumé historique qui permet de fixer les grandes charnières du cadre chronologique dans lequel s’insèrent les légendes et coutumes qui en sont issues. Car ce sont bien elles, ces légendes et ces coutumes, qui font la trame de l’ouvrage et le cœur de ses quatorze chapitres. Même quand il est question de personnages historiques avérés, comme la princesse Huyền Trân sur qui s’ouvre le recueil, ou le docteur Yersin sur qui il se referme, Nguyễn Tấn Hưng expose les différentes variantes des contes locaux qui se sont greffés sur la grande histoire et qui, de proche en proche, de glissement en gauchissement, lui ont donné la saveur très particulière des mythes populaires se transmettant de génération en génération, mais sans jamais se répéter à l’identique. La religion y occupe naturellement une grande place – « Madame » est en effet la grande figure locale –, mais tout autant les conditions matérielles de l’existence, par exemple la difficile récolte du bois d’aigle ou le travail pénible des pêcheurs de la côte. Mais, qu’elles concernent les grands événements du passé ou bien les petits faits du quotidien, les hommes illustres ou les gens de peu, ces histoires ont toujours en commun de faire le lien avec l’ensemble d’une cosmogonie dont le moins qu’on puisse dire est qu’elle est marquée par le règne du monde animal. Au fil des pages écrites par Nguyễn Tấn Hưng, qui exhume et traduit pour nous des contes oubliés, c’est tout un peuple qui surgit, mais un peuple de loutres, de baleines, de tigres, de crabes et de moustiques. Les uns sont fastes, les autres terribles, et ils le sont alternativement, selon les époques et selon les peuples qui les vénèrent.
Ce qui fait tout l’intérêt de ces légendes, outre le plaisir qu’on éprouve à les lire, c’est d’abord qu’elles sont en permanence réinventées, reconstruites, remodelées pour répondre aux besoins présents de ceux qui les racontent. Venue du fond des âges, la loutre vient prêter secours à l’empereur Gia-Long, qui monte sur le trône en 1802 ; les gens du Nord venus au Khánh-Hòa en 1954 sont intégrés dans le tissu légendaire, où un peu plus tard la police politique et les camps de rééducation trouvent aussi leur place. L’histoire vécue par les contemporains se coule ainsi dans un récit qui tire toute sa force de n’être pas figé dans un dogme et qui, par conséquent, est plus apte que les religions constituées à répondre aux interrogations du présent. Ensuite, ces légendes intègrent en leur sein l’existence des populations minoritaires que l’histoire officielle – celle des annales de la Cour – n’a guère mises en avant. Les coutumes et légendes des Raglai et des Gié Triêng, par exemple, sont d’autant plus importantes qu’elles sont très mal connues par ailleurs ; et on ne peut qu’être surpris de la manière dont elles se sont mêlées à celle des populations viêt elles-mêmes. Il y avait jadis beaucoup plus de contacts entre plaine et montagne qu’on a tendance à le croire aujourd’hui, et les histoires populaires, parce qu’elles en portent la trace, constituent un précieux témoignage de ces échanges qui ont été culturels, et sans doute bien davantage.
Le livre de Nguyễn Tấn Hưng est donc un livre qui au plaisir d’apprendre ajoute celui de s’interroger. Ces contes sont importants, ils véhiculent tout un monde imaginaire qui échappe aux archives ordinaires et, si leur interprétation n’est pas chose facile, elle ne s’en impose pas moins à celui qui, une fois sur place, dans le Khánh-Hòa, s’aperçoit qu’ils sont encore très vivaces.